Le p'tit Gavroche

Paris, le 26 février 2018

"Vous savez ou vous allez dormir ce soir ?"

J'étais en chemin pour aller déposer mes conventions de stage à l'université, quand je suis passé devant deux hommes, installées dans la rue sur un matelas, et recouverts d'une couverture. 

"Parce que il va faire super froid cette nuit ! Vous avez un endroit où dormir ? - Moi, ouais, je sais. Mais lui, il sait pas... - Vous avez essayé d'appeler ? Quand il fait froid comme ça, ils ouvrent des lieux d'hébergement. - Le 115 c'est ça ? Oui, on appelle, parfois ils ont de la place, parfois ils en ont pas... - Et vous voulez appeler avec mon téléphone, pour ce soir ? - Nan, ça va être complet, ça sert à rien. - Bon... Bah je sais pas trop comment vous aider, du coup. - C'est pas grave! Déjà, vous intéresser à nous c'est bien ! Vous êtes un humain, on est pareils ! Il y a des gens, ils pensent qu'on est nés comme ça, qu'on est rien... Ils nous jugent sur l'apparence. Moi, vous voyez, je parle français, c'est pas ma langue d'origine, je l'ai appris. J'ai appris le français, et les gens, ils me répondent même pas. - Ouais, c'est nul... (J'avoue que je ne sais pas trop quoi répondre à ça) Bon, vous êtes sûrs que vous voulez pas que j'appelle, ou quelque chose ? - Non, non, c'est bon, merci ! En tout cas merci beaucoup pour votre humanisme, ça fait plaisir !"

Le mec me remercie de lui avoir adressé la parole... Il me remercie pour mon humanisme... J'ai pas osé lui demandé ce qu'il pensait de mon humanisme quand, dix minutes avant dans le RER, j'avais fait un sourire d'excuse un peu crispé à un mec enroulé dans une couette, qui demandait de l'argent. 

En tout cas, si il y a bel et bien 50 personnes qui vivent dans la rue en Ile-de-France [1], j'ai réussi à en voir un bon quart en une matinée... 

A.F

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[1] Quand le gouvernement minimise le nombre de SDF en Ile-de-France, Les Echos, 03/02/2018