Le p'tit Gavroche

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Chroniques


Déliveroo, l'autonomie au goût d'auto-exploitation

Paris, le 3 juillet 2018

 

« - Quoi, dix minutes ?! - Non, non, une minutes, t'inquiètes ! »

 

Cet échange entre un livreur de Déliveroo et un employé de restau,  j'y ai assisté alors que je descendais la rue de Bagnolet. Il venait de s'arrêter en scooter devant le restau (libanais, de mémoire), pour venir récupérer la commande. A peine arrivé, un rapide bonjour, et il tend le téléphone pour montrer le numéro de la commande. J'ai entendu l'impatience (ou l'angoisse) du mec quand il a mal compris la réponse du restaurateur, eet qu'il a cru qu'il devrait attendre dix minutes... Et je me suis revu, moi, quelques années plus tôt, lorsque j'étais livreur de bouffe thaï...

 

A l'époque (coup de vieux), Déliveroo n'existait pas. Il y avait bien AlloResto, mais c'était uniquement une plateforme de commande. Du coup, on était tous salariés du restaurant dans lequel on bossait. Au même titre que les cuistots, que l'assistant manager, ou que le directeur. Bref, on formait une équipe... Certains livreurs venaient bosser un mois, d'autres un peu plus longtemps.

 

Pour ma part, j'ai bossé trois ans là-bas, pendant mes études. Et je ne me souviens pas une fois avoir été angoissé d'attendre une commande dix minutes. Parce que lorsque l'on attendait les commandes, eh bien on faisait autre chose : on allait laver les scooters, on filait un coup de main à la caisse, en salle, ou pour préparer les commandes... On discutait avec les autres employés, on rigolait, parfois on s'emmerdait... La vie quoi. Ce qui fait qu'aujourd'hui, cinq ans après avoir démissionné, j'ai encore des nouvelles des gens que j'ai connu là-bas. 

 

Et je me demande : Ce mec là, qui bosse à Déliveroo, qui il reverra dans cinq ans ? De qui il prendra (ou ne prendra pas) des nouvelles ?

 

Le temps c'est de l'argent. Comme tu es payé à la commande, plus tu taffes vite, plus t'es payé... Toujours au lance-pierre, ceci dit. Dans ces conditions là, moi non plus j'aurai pas envie de glander dix minutes à attendre une commande. Dans ces conditions là, moi non plus, je prendrai pas le temps de discuter un peu avec les gens. Dans ces conditions là, moi aussi je foncerai à fond la caisse, en prenant des risques, pour gratter des secondes...

Alors, bon, le truc de foncer, on le faisait déjà avant, pour se donner des petits défis entre livreurs, pour avoir quelques sensations fortes, ou parce que le patron nous mettait la pression, et c'était déjà con... Mais maintenant, le faire en ayant le sentiment d'être libre, alors que la nécessité de prendre des risques est devenu obligatoire pour avoir une paye décente, c'est carrément de la skyzophrénie ! 

 

« T'es libre, tu taffes tout seul, tranquille sans patron... » Libre, bof... Tout seul, ça c'est clair ! 

 

Voilà ce qu'a réussi a faire Déliveroo et l'uberisation de la société... En dehors de l'évasion fiscale, des conditions de travail dégueulasse, de la paye au lance pierre, du fait qu'on prend soi-même en charge son matos de travail (c'est déjà pas mal)...

 

Avec l'uberisation, plus besoin de patron, plus besoin de collègues, on passe à l'autonomie parfaite : Vive l'auto-exploitation ! 

 

T.J

 


05/07/2018
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Macron à la conquête de l'imaginaire

Montreuil, le 30 avril 2018

 

Dans la nuit de dimanche à lundi, un nouveau campus universitaire a été évacué par les forces de l’ordre. Une évacuation pleine de sens, à l’aube d’une semaine qui s’annonce tendue, avec trois jours de mobilisation déjà prévus. Alors que l’Etat s’enlise dans le bourbier de la ZAD de Notre-Dame-des-Landes, cette nouvelle évacuation n’est qu’un des nombreux signes que la guerre que même Macron, sous couvert de combat social, est une guerre idéologique.

 

La violence sociale de la politique néolibérale du président aura jusqu’à présent difficilement échappé à quelqu’un. Entre la destruction programmée des rares statuts encore enviables de notre société (cheminots, fonctionnaires), le démantèlement  du code du travail, l’imposition du principe de sélection et de compétition dans les rares bastions de la République qui en étaient encore exempts, une politique migratoire indigne, et bien d’autres chantiers ouverts sous un fond de suppression de l’ISF, Macron a clairement montré de quel côté du portefeuille son cœur balançait.

 

Ayant renoncé dans ses premiers mois de mandat à sa mission présidentielle de représentation de tout le peuple, il a en fait très rapidement délaissé une bonne partie de la population (les riens, les feignants…) pour flatter les puissants. Le réac est rassuré, les classes supérieures sont de plus en plus convaincues et l’électeur historique de droite trouve peu à redire à son programme.

 

Mais l’opinion des classes populaires décroche, s’effondre. Les pauvres grognent ! Il faut les reconquérir.

 

Et c’est sur ce constat qu’apparait lors de ses deux interviews télévisées des 12 et 15 avril derniers, comme par enchantement, le nouvel ennemi commun, qui pourra souder la Nation : Les « professionnels du désordre », qui sévissent notamment dans les universités, et à NDDL. Qui sont ces gens, qui s’approprient (ou se réapproprient) des terres, des lieux, sans être passés par la case «Etat de droit » et « Etat d’ordre » ? Ces gens qui prennent en otage, dépossèdent les pauvres gagne-petit qui, eux, veulent bien subir cet « Etat d’ordre » et ses règles ?!

 

Macron le pragmatique, en désignant les occupants des terres et des facs comme des fanatiques du désordre, sans autre conviction que le chaos, se mue tout à coup en grossier populiste. Les masques tombent, et la véritable portée de la guerre sociale qu’il est en train de mener surgit.

 

Ecraser, détruire, soumettre l’imaginaire.

 

Car on peut difficilement penser qu’un groupe de cultivateurs et de naturalistes présentent un danger immédiat à la sécurité de la France. Mais les idées qui y circulent, les modes de vie nouveaux qui s’y construisent, les expériences agricoles qui s’y mènent font peur. Comment tolérer qu’au sein de la République des idées différentes, voire contraires au monde pragmatique du néolibéralisme prennent vie, se développent en dehors des règles prédéfinies par ce même néolibéralisme ?  De même, comment peut-on laisser la jeunesse s’auto-organiser, développer ses idées, ses programmes, s’émanciper, sur une autre base que celle du pragmatisme macronien ?  Il faut donc soumettre, étouffer ces voix dissidentes. Par la  dé-crédibilisation dans les médias, et par une répression policière forte sur place. La blague et la matraque : La main de fer dans un gant de velours fait son grand retour.

 

Ceux qu’on ne peut pas soumettre par le portefeuille le seront par les lacrymogènes ! Voilà le mot d’ordre de Macron et de son néolibéralisme autoritaire.

 

Ne nous y trompons pas. Au nom du respect du droit commun, ou de la sécurité, c’est l’imaginaire qui est attaqué. La liberté d’imaginer un monde nouveau, différent, qui nous avait pourtant été promis par le candidat Macron.

 

Le constat est là : aujourd’hui, en France, on combat l’imaginaire des gens à grands coups de véhicules blindés et de CRS.

 

Alors, quel meilleur mois que celui de Mai pour réactiver un imaginaire atrophié, sclérosé, et toujours plus menacé ? Quel meilleur mois que le mois de Mai pour nous réapproprier l’espace, et le réinventer ? Rues, universités, gares, bourses du travail, usines… Tout cela nous appartient, il est temps de s’en rappeler. Pensons printemps !

 

T.J

 


30/04/2018
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Entre le fromage et le dessert, valse de vaisselle entre Jean-Pierre et Jupiter

Paris, le 12 avril 2018

 

Aujourd'hui, Jupiter sort de sa réserve. Il doit rassurer le peuple ! Et quel meilleur endroit que TF1 pour rassurer le peuple ? A l'heure du déjeuner, face à un Jean-Pierre Pernault gonflé à bloc, le président parle à la France. On s'attendait à une belle interview passe-plats, on a été servis ! Attention, faut s’accrocher…

 

Un décor bucolique, à l’image de l’habituel JT de notre JPP national : L’interview se déroule à Berd’huis, joyeuse petite bourgade du Perche, au sein de son école ultra connectée. On ouvre le journal sur une cour de récré remplie d’enfants, qui rient, jouent, s’amusent… De quoi oublier un peu cette horrible période de grèves, de contestations, et d’échapper quelques temps aux terribles images de manifestants casseurs gavés de merguez !

 

Et de suite, une promesse faite par JPP : « Je poserai au Président les questions que vous vous posez. » Alors, ça, c’est chouette, parce que des questions à lui poser, j’en ai quand même deux ou trois…

 

Le bal ouvre sur la Syrie. Macron nous parle lutte contre le terrorisme, contre le régime de Bachar. Il parle d’aides aux ONG et reconstruction de la Syrie de demain… Et les Kurdes ? Pourquoi il en parle pas ? Merde ! Je pensais qu’il allait répondre à mes questions !? Premier faux pas, Jean-Pierre !

 

S’en suit un petit reportage. Les gens s’expriment sur ce qu’ils pensent de notre Président. Il est jeune, il est sympa, courageux, il fait ce qu’il dit… Et là, patatras, un énervé débarque : « C’est quand même un peu le Président des riches ! ». JPP transpire : « Monsieur le Président, qu’est-ce que vous avez mal fait pour que les gens aient ces impressions ? » Impressions, Jean-Pierre ? Tu ne penses pas que les gens ont plus que des impressions… Certains auraient-ils peut être même des raisons ?

 

L’interview se poursuit, et Manu pose un nouvel acte de foi envers nos concitoyens fortunés : « On lève l’ISF pour réinvestir dans le pays, parce qu’on est patriotes ! » Mais alors, quid du patriotisme lorsque l’on voit tout cet argent qui part à l’étranger en « optimisation fiscale », tous ces exilés, qui se font la malle à l’étranger avec leur magot ? Comment s’assurer que l’allègement d’impôt leur fera retrouver leur âme patriotique ? Pas de réponse… Ou plutôt, pas de question… Deuxième mauvais point, Jean-Pierre ?

 

Après une magnifique métaphore de la parfaite petit société inégalitaire (car oui, dans une cordée, « si on est tous au même niveau, la cordée tombe »), on passe aux cheminots !

 

Ah ! Eh bah voilà ! On les retrouve nos manifestants énervés gavés de saucisses ! Enfin, pas tout à fait. On assiste à un petit reportage bien huilé, bien chiadé, sur des usagers excédés, révoltés contre cette grève « infernale », « inadmissible ». « Ils nous prennent en otage ! » dis l’un, « ils vont nous handicaper », déclare l’autre… Mr Macron compatie ! Par ailleurs, il affirme n’avoir aucun mépris pour les cheminots, et pour cause, son papy en était un, de cheminot !

 

Le Président explique la réforme, essaye de rassurer son auditoire : « Je garantis à 100 % que la SNCF restera publique », nous assure-t-il. Ou encore « les petites lignes vont se développer davantage ». Ah, et avec quel argent ? Celui que les régions n’ont plus ? Troisième mauvais point, Jean-Pierre ! « On ira au bout », s’engage finalement Manu.

 

On passe aux hôpitaux. Le Président s’engage : « On va mettre plus de moyens dans l’hopital ! » Ah, bah voilà, ça, c’est beau ! Je déchante très vite, lorsqu’il embraille sur les EHPAD : « C’est un énorme chantier, ça ne se fait pas en claquant des doigts. Ce n’est pas juste mettre de l’argent ». Moi qui croyais que la ministre de la Santé, Agnès Buzyn, se foutait de notre gueule avec ses 50 millions d’euros débloqués pour les EHPAD, en fait, non, c’était juste pas la solution, l’argent !

 

Allez, hop ! Au tour des retraités ! Parce que c’est que les retraités, ces derniers temps, ils ont un peu l’impression d’être les dindons de la farce… « Vous expliquez, mais les gens ne comprennent pas ! » s’indigne Jean-Pierre. Ah, ces gens, qu’ils sont cons ! « Vous voyez, nous explique le Président, le facteur retraité qui a environ 1500 € de retraite, il gagne 20 € de moins. Mais j’ai envie de lui dire : Votre voisin, qui vit au minimum vieillesse, qui touche trois fois moins que vous, lui, il aura 30 € de plus. Mais pour ça, personne ne nous remercie ». Ah bah effectivement, expliqué comme ça, moi aussi je comprends. Regarder la misère de son voisin, c’est vrai que c’est la meilleure solution pour être satisfait de ce qu’on a…

 

On arrive aux 45 minutes d’émission, et je perds ma concentration… Surement mon omelette qui me pèse sur l’estomac… Ou l’indigestion provoquée par ce que j’entend… Bref, j’entend parler dette, terrorisme, fracture territoriale, code du travail, mais sans vraiment comprendre…

 

Quand soudain, une déclaration capte mon attention. Alors que JPP axe la discussion sur Notre-Dame-des-Landes et les opérations menées depuis 4 jours dans la ZAD, le Président qualifie les zadistes de « gens qui ne cherchent qu’à créer le trouble » et à « déranger l’ordre public »… Curieux discours, alors que deux jours avant, je voyais des gendarmes dévaster une bergerie… Peut être que l’acte humain de réagir au saccage de son lieu de vie, de ses projets, échappe à Jupiter…

 

Même méthode pour les étudiants mobilisés contre la loi ORE : « Dans beaucoup d’universités occupées, ce ne sont pas des étudiants, mais des agitateurs professionnels. » Dis donc, Manu, tu deviendrais pas insultant, là ? Mais, non, il rectifie de suite le tir, et délivre un conseil à la jeunesse. Ce genre de conseils que vous glisse votre tonton, à Noël, au moment de déboucher la troisième bouteille de rouge : « Si les étudiants veulent avoir leurs examens, il vaut mieux les réviser, car il n’y aura pas d’examens en chocolat dans la République. »

 

Un beau moyen de conclure une interview, par le mépris affiché de tous ceux qui s’opposent à lui… En bon enfant capricieux, Manu méprise ceux qui ne cèdent pas à ses caprices. En bon enfant capricieux, Manu se fabrique lui-même ses ennemis. Et en bon enfant capricieux, Manu finira par se retrouver tout seul, sans plus personne pour jouer avec lui.

 

A.F

 

PS : Comme vous vous en doutez, nous n'avons ni l'objectivité ni la conscience professionnelle des journalistes de TF1 ou de BFM, aussi nous avons selectionné de manière tout à fait arbitraire des tronçons de l'intervention de notre Président... On vous encourage donc à juger par vous même, en regardant l'interview en replay... Enjoy, comme on dit ! 

 


12/04/2018
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On a goûté la mobilisation étudiante sauce Cnews... Et on aime pas trop l'arrière goût...

Paris, le 3 avril 2018

 

Ce matin, c'est jour de grève, et jour de blocage !

 

Levé  5h30 du matin, pour aller bloquer la fac ! Affaire pliée en 20 grosses minutes.

 

A 10 heures se tient l’Assemblée Générale dans le hall d'entrée ; on est plus de 300, presque le double de la dernière fois ! Tout le monde peut prendre la parole.  Ca argumente, applaudit, se contredit, s’engueule... Ca échange, quoi !

 

Certains sont à l'aise, savent parler en publique. D’autres bafouillent un peu, se perdent dans leurs pensées, stressent devant autant de monde !

 

Certains, embarqués par la passion, se lancent dans la description des idéaux que l'on défend ! D'autres racontent modestement leur histoire, comme Jordan, étudiant en 2ème année de Géographie : « Il y a deux ans, quand je suis allé au salon de l'étudiant, j'ai vu cette formation à l'école Epitech ! Ca avait l'air mortel ! Mais ça coûtait 6000 € l'année. Je ne pouvais pas m'inscrire. Je suis finalement arrivé en géographie ici, et ça me plait, je pense à faire de la recherche plus tard ! Eh bah moi, typiquement, si les frais de fac avaient été plus élevés, j'aurai jamais pu arriver ici ! C'est pour ça que je me bats, pour que d'autres puissent profiter de la même chance que moi ! »

 

On s’écoute, on se laisse parler, on se respecte ! Bref, on essaye de mettre en place cette fameuse démocratie dont on entend tant parler depuis qu’on est petits, et qu’on a pourtant rarement vu dans la vie de tous les jours.

 

Après deux heures de débat, l'AG décide à la grande majorité de maintenir le blocage pendant 3 jours ! 

 

 

 

Le centre universitaire de Clignancourt Paris Sorbonne occupé le 3 avril 2018

Applaudissements, cris de joie ! Sauf que maintenant y a du boulot ! Il faut s’organiser ! Alors qu'une partie des étudiants partent en manifestation pour soutenir les cheminots, d'autres restent pour organiser la vie sur place.

 

On crée des commissions : Commission courses, comission matos, comission ateliers, comission parlementation avec la direction, etc. 

 

Au bout d'une heure de cette terrible « anarchie » dont on entend aussi beaucoup parler depuis qu’on est petits, un petit groupe d'une vingtaine d'étudiants se retrouve en cercle à débattre de la place des femmes dans les débats publiques. Quelques étudiants discutent sur les possibilités de mettre en place un atelier d'imporvisation théatrale pour le lendemain. D'autres encore, appellent des professeurs, pour leur demander si ils voudraient bien donner des cours informels ouverts à tous... Bref, c’est pas grand chose, mais on est fiers de ce qu’on fait...

 

A 17 heures, je repasse chez moi, chercher mes affaires pour dormir à l'université... Zap, j'allume la télé pour avoir quelques nouvelles de la manifestation... DAMNED ! Je tombe sur Cnews... 15 secondes d’images sur le mouvement étudiant, et qu’est-ce qu’ils montrent ? Des mecs en train de s’empoigner devant l’entrée d’une fac ! L’objectivité journalistique dans toute sa splendeur !!! 

 

Putain ! 

 

Et puis je me reprends : S'ils mettent autant d'énergie et de mauvaise foi à nous dénigrer, c'est peut être qu'ils sentent le vent tourner... C'est qu'un vent de printemps commence à se lever...

 

 T.J

 


03/04/2018
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Quand France 2 bichonne les étudiants

Montreuil, le 28 mars 2018

 

« T’as vu ce qui s’est passé à la fac de Montpellier ?! C’est une histoire de fou ! - De quoi ? Qu’est-ce qui s’est passé à Montpellier ? »

 

Ah ouais ! Alors c’est vrai qu’étant étudiants, au P’tit Gavroche, on a un peu tendance à croire que la fac, c’est le centre du monde… Mais on se disait, là, quand même, des jeunes qui se font passer à tabac dans une fac par des profs cagoulés, et avec le soutien de l’administration en prime [1] (attention, l’enquête n’a pas rendu son verdict, il s’agit uniquement de très très fortes suppositions... sérieux journalistique !), on se disait que ça allait quand même en choquer plus d’un !

 

Mais tout au long du week-end, plus on en parlait aux gens, plus on se rendait compte qu’on était un peu les seuls au courant… On a donc cherché à savoir pourquoi ! Comment ces gens là s’informent-ils, pour ne pas être au courant d’un tel événement ?!

 

On s’est dit qu’on allait analyser les JT de 20h de TF1, journal le plus regardé par les français… Et puis, honnêtement, on a pas eu le courage ! Alors on s’est rabattus sur le JT de France 2. Notre bon service public ne pouvait pas passer à côté du fait qu’on laissait tabasser les enfants de la République dans les facs !

 

Résultat de notre super enquête : Entre vendredi 23 et mercredi 28 mars, deux minutes consacrées aux événements de Montpellier (ou aux événements qui se passent dans les facs en général, d’ailleurs)…  Deux ! Sur  plus de trois heures de JT…

 

Alors comme au P’tit Gavroche, on est objectif, et qu’on n’a pas de parti pris, on s’est dit que l’actualité avait été assez dense, et qu’ils avaient été pris par les événements… C’est vrai qu’entre l’attentat de Carcassonne, l’hommage au colonel Arnaud Beltram, et le meurtre de Mireille Knoll, les horreurs et moments forts se sont enchainées ces derniers jours !

 

Et puis il y avait aussi l’actualité brûlante : Au JT du vendredi, on apprend que certains français ont mal au dos ! Pendant le JT du lundi, une enquête choc sur les nouveaux portiques dans les métros parisiens. Et le must : Un reportage qui nous explique que la croissance bondit, virevolte, au point que l’entreprise « Manitou » va bientôt pouvoir embaucher 300 personnes ! Des interviews de travailleurs tout sourire, un François Lenglet au top de sa forme qui nous explique que tous les indicateurs sont au vert pour l’économie française… « Ah ! Elle est belle notre France ! », qu’on s’est dit en voyant ces images !

 

C’est vrai qu’un François Lenglet épanoui, c’est vachement plus vendeur qu’un étudiant qui saigne… Et ça rend les gens contents, c’est bien !

 

Et puis on s’est dit qu’on allait jeter un œil au Média, par curiosité : si, le Média, vous savez, cette nouvelle web télé, repère d’islamo-gauchistes, centre névralgique de la propagande mélanchonienne ! On s’est rendu compte qu’en quatre JT, ils avaient passé plus de 20 minutes à parler de ce qui s’était passé à Montpellier, des violences à l’université de Lille, et du mouvement étudiant. 

 

Et franchement, l’énergie que déploient beaucoup d’étudiants pour se battre pour l’égalité des chances, par leur chance à eux, mais celle des autres, de ceux qui vont venir après eux, elle mérite bien qu’on se pose 20 minutes pour en parler. Alors, pour le coup, merci au Média ! Quant aux autres, si vous ne voulez pas nous entendre, vous finirez bien par être forcés de nous écouter ! 

 

A.F

 


[1] A Montpellier, des étudiants violement expulsés de la fac de droit par des individus cagoulés, Le Monde, 23/03/2018

 


29/03/2018
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